Du Mirsky’s Broiling House au Symposium


 

Les nombreuses incarnations de l’immeuble située au 5334 avenue du Parc reflètent bien les transformations commerciales de cette artère au fil du temps. Construite en 1910, c’est d’abord l’une des résidences de la période où l’avenue se voulait une adresse exclusive. Puis, de 1938 jusqu’au début des années 1950, la maison abrite, sous différentes dénominations, un « Steak House » juif au rez-de-chaussée et un appartement à l’étage. Le Park Casino occupe ensuite les lieux à partir de 1952. Sa publicité met l’accent sur les artistes de cabaret, les orchestres de danse et les danseuses « exotiques » qui s’y produisent, mais s’il défraie la chronique des journaux montréalais pendant cette période, c’est pour de toutes autres raisons…

Le Park Casino, 5334 avenue du Parc, 14 mai 1958. Archives de la Ville de Montréal, VM105-Y-1_0576_003 (détail).

En novembre 1952, les journaux montréalais annoncent l’ouverture d’une  « chic boîte de nuit », le Park Casino. Il prend la relève du Mirsky’s, un restaurant fréquenté par la communauté juive du Mile End et d’Outremont. Au cours des années suivantes toutefois, le Park Casino fait surtout parler de lui pour les agressions de clients et d’employés, les bagarres générales et les alertes à la bombe attribuées aux « guerres de gangs ». À tel point que la police de Montréal révoque son permis en 1954. Le Park Casino continue quand même ses activités, car les propriétaires contestent la mesure devant les tribunaux.

En 1959, le Comité exécutif refuse de régulariser la situation après que le chef de police eut témoigné que l’établissement « est fréquenté et sert de rendez-vous à une classe de gens indésirables, qui sont même souvent recherchés par la police locale ou étrangère et que le personnel de cet établissement ne coopère nullement avec le service[1]. »  Le Park Casino va finalement obtenir à nouveau son permis l’année suivante, grâce à l’arrivée d’une « nouvelle administration » plus coopérative selon la police, ce qui n’empêchera pas une série de nouveaux incidents jusqu’à sa fermeture en 1964.

Publicité du Park Casino, Montréal-Matin, 11 mai 1959, p. 11.

L’adresse est ensuite occupée par une série de restaurants éphémères ou devient vacante, jusqu’à l’ouverture, en 1973, du Symposium, l’un des premiers restaurants grecs de l’avenue du Parc à vocation gastronomique. Il se décrit comme un « monastère grec au cœur de Montréal » et est doté d’une piste de danse au sous-sol. À partir de 1987, le Symposium n’occupe plus que la salle du sous-sol, tandis que des restaurants éphémères se succèdent de nouveau à l’étage. L’édifice retrouve en partie sa vocation résidentielle au début des années 2010, avec l’ajout d’une mezzanine sur le toit et l’aménagement de bureaux professionnels au rez-de-chaussée.


[1] « Permis de restaurant refusés à deux clubs », Le Devoir, 14 novembre 1959, p. 1.
Recherche et rédaction: Yves Desjardins

Cet article est tiré de L’avenue du Parc et son histoire d’Yves Desjardins, publié en octobre 2023 par Les éditions du Septentrion. Avec l’aimable permission de l’éditeur.