L’année 1910 marque le début de la construction d’immeubles à appartements sur l’avenue du Parc, au nord de l’avenue Mont-Royal : les appartements Fairmount Court (5300-5308), Valmont (5283-5285), Saint-Georges (5200-5206) et King George (5352) et Pierrefonds (294 rue Villeneuve Ouest, à l’angle de l’avenue du Parc), sont les premiers immeubles à appartements à être bâtis.
Alors que l’avenue avait été initialement pensée pour être une rue de résidences individuelles, à partir des années 1910, l’immeuble à appartements devient le type d’habitation prédominant de l’avenue et en change la physionomie. Isabelle Huppé, chercheuse spécialiste de la construction des immeubles à appartements avant 1914 à Montréal, définit ainsi ce type d’habitation : l’immeuble à appartements est une « habitation urbaine, principalement, mais pas uniquement, de type locatif, construite avec l’intention de loger plusieurs familles, comprenant au moins deux étages, dont au moins trois appartements ont une entrée privée donnant sur un couloir, un vestibule, un escalier ou un ascenseur commun à l’intérieur et permettant aux locataires d’un appartement de mener une vie à l’écart des locataires des autres appartements de l’immeuble, en raison de la présence d’une cuisine et d’une salle de bains comprenant une toilette et une baignoire ou une douche. ».
Les premiers immeubles à appartements apparaissent à Montréal à partir des années 1880. Il n’a pas été facile de faire accepter ce type d’habitation à Montréal. Le partage des entrées et des couloirs créait, en effet, selon l’Église, un risque de promiscuité : les maisons unifamiliales et les duplex ou triplex avec leurs logements aux entrées séparées semblaient plus sûrs pour la bonne morale. Mais à partir de 1910, la construction de ce type d’habitation s’intensifie. L’immeuble à appartements apparaît comme la réponse à la densification de l’habitat et au coût élevé des terrains. L’avenue du Parc, en raison de son statut d’artère principale et des nombreux lots encore vacants, est une bonne candidate à ce type de développement.
En 1910, l’avenue du Parc est encore une rue de prestige. Ses immeubles à appartements ne sont pas conçus pour une clientèle modeste. Ils hébergent essentiellement des membres de la bourgeoisie, souvent de petits ménages : des patrons, des cadres supérieurs et moyens, des rentiers, des couples sans enfants ou encore des célibataires. Les appartements offrent les commodités d’une résidence bourgeoise mais sans le tracas et le coût de l’entretien d’une domesticité nombreuse. Ainsi, une publicité parue dans La Presse du 2 mars 1911 vante les commodités des neufs logements offerts à la location des Appartements Valmont : « chauffage, eau chaude à l’année, glacière, électroliers, poêle à gaz, glace, buanderie, service de concierge, téléphone dans la bâtisse, chambre de débarras, entrée de service, monte-charge, etc. » La conception de l’édifice est typique de celle de nombreux immeubles à appartements du secteur : les appartements sont organisés en U autour d’une cour intérieure. Cet édifice est, de plus, exceptionnel par le fait qu’il a conservé sa façade d’origine au niveau inférieur. Contrairement à de nombreux immeubles à appartements de l’avenue du Parc, la conversion de son rez-de- chaussée en espaces commerciaux n’a pas entrainé la défiguration de sa façade par l’amputation des saillies au niveau de la rue afin d’accommoder les devantures. On peut supposer que cette préservation tient à une conversion tardive du rez-de-chaussée en boutiques qui a lieu pendant les années 1950.
En 1935, les Appartements Valmont changent de nom. Ils sont rebaptisés Appartements Ida, du nom de leur nouvelle propriétaire, Ida Goulet, épouse de l’avocat Georges Coutu.
Voir aussi
Appartements Fairmount Court
Appartements Pierrefonds
[Recherche et rédaction : Christine Richard]