
L’ancien aréna Mont-Royal, patinoire des Canadiens de Montréal entre 1920 et 1926 [BAnQ 06M_P20,S3,P44]
L’aréna accueille des combats de boxe et de lutte dès sa première année d’activité. Le lutteur Yvon Robert (1914-1971), presque aussi populaire que Maurice Richard durant les années 1940 et 1950, y fait salle comble en 1933.
L’aréna sert également à des artistes de la scène. Le concert qui fracasse tous les records montréalais d’assistance, de recettes, d’applaudissements et… de cachet est celui d’Enrico Caruso, le 27 septembre 1920, quelques mois avant le décès prématuré du ténor italien.
Ce fut la soirée la plus triomphale que nous ayons encore eue à Montréal, et cela, en dépit d’une température de fournaise dans une immense grange où les fauteuils étaient d’un dur, et où, par moments fort inopportuns, les voix et les instruments étaient accompagnés malencontreusement de bruits de cornes d’automobiles, de timbres de tramways. – La Patrie, 28 septembre 1920
L’immense salle est prisée pour les grands ralliements. Située dans un quartier plutôt favorable au Parti communiste, elle se prête aux événements propres à attirer les foules militantes.
Durant la guerre civile espagnole (1936-1939), l’accès à l’aréna fait l’objet de luttes entre divers groupes. L’opinion publique montréalaise est divisée. La hiérarchie et la population catholiques sont violemment hostiles au gouvernement républicain, mais une autre partie de la population et les milieux de gauche y sont plutôt favorables. En 1936, les délégués de la République espagnole, venus contrer la propagande profranquiste et rechercher des appuis auprès des Montréalais, sont empêchés par diverses manœuvres de tenir un grand rassemblement à l’aréna. La même chose se produit plus tard lors de la visite de l’écrivain André Malraux. L’aréna Mont-Royal ouvre pourtant ses portes en juin 1937 au docteur Norman Bethune, héros de la gauche montréalaise et canadienne jouissant d’une grande notoriété. Le docteur Bethune, qui a créé le service de chirurgie thoracique à l’hôpital du Sacré-Cœur, a mis sur pied un service mobile de transfusion sanguine sur les champs de bataille en Espagne. Revenu au pays recueillir des fonds pour établir un orphelinat destiné aux enfants victimes de la guerre civile, il s’adresse à plus de 7 800 personnes dans l’aréna, décoré de bannières aux couleurs de la République espagnole et d’affiches proclamant « ¡No Pasaran! » (« Ils ne passeront pas! » – un cri de ralliement antifasciste).
Victime de la concurrence du Forum, l’aréna Mont-Royal sera converti en bâtiment industriel en 1938. Plus tard, il a été occupé par des commerces. Au moment de sa destruction par un incendie monstrueux le 29 février 2000, une bonne partie de sa superficie servait au magasin de l’organisme d’assistance de femmes en difficulté Le Chaînon. Son site est désormais occupé par un supermarché.
Une patinoire municipale, également appelée « aréna Mont-Royal », a ouvert en 1972 dans le parc des Compagnons-de-Saint-Laurent, dans l’est du Plateau.
Pour en savoir plus :
Andrée Lévesque, « Du rouge sur la « Main » pendant les années trente », Bulletin du RCHTQ, vol 28, no 1, printemps 2002, pages 39–53 (à partir de la page 46 sur l’aréna)
Recherche et rédaction : Bernard Vallée. Révision : Justin Bur
Extrait du Dictionnaire historique du Plateau Mont-Royal (Écosociété, 2017) avec l’aimable autorisation de l’éditeur